Le Temps

Ce ne sont ni les enfants, ni l'argent, ni les problèmes en général qui tuent le plus une relation amoureuse plutôt normale...c'est le TEMPS. Ou plutôt, permettez-moi d'être plus précis : La ROUTINE, qui est un sous-produit du TEMPS. Je parle régulièrement à des personnes d'origines, de milieux et d'âges différents : c'est ma passion plutôt que ma pratique. C'est dans ces multiples conversations que je trouve des réponses à certaines introspections...ainsi que d'autres questions. 

Cette année a été difficile sur le plan social ; elle a laissé des cicatrices qui mettront du temps à se refermer. Et pourtant, je sais que le temps ne guérit pas les blessures...le temps est tout simplement. Il passe sans être entravé par nos espoirs et nos désirs. Très vite, le reflet dans le miroir vieillit, les bruits des enfants, des animaux de compagnie, des amoureux et des amis s'adoucissent et il n'y a plus de travail à faire en urgence ni de projets à réaliser.

"J'ai juste besoin d'un peu de temps pour remettre mes sentiments sur les rails". J'ai envoyé un texto. "Que dirais-tu de la semaine prochaine ? Quand cela te conviendrait-il ?"

Un jour s'est écoulé avant que la réponse n'apparaisse.

"Je n'ai plus le temps de t'attendre." 

Je me suis demandé à ce moment-là ce qui avait bien pu déclencher l'implosion de sa patience fragile, alors qu'il n'avait fait aucun effort particulier pour moi, à part attendre que je fasse tous les mouvements.

"D'accord." J'ai répondu. Je m'attendais à plus d'amabilité...plus d'attention compte tenu du temps que nous avions mis à nous connaître. 

Je me suis laissé faire sans me battre cette fois-ci. J'avais suffisamment lutté pour une rupture précédente, bien plus douloureuse. 

J'ai été surpris à plusieurs reprises d'entendre des jeunes hommes et des jeunes femmes (beaucoup plus jeunes que moi pour être précis) me dire qu'ils n'avaient pas le temps de s'amuser ou d'avoir une relation.

Et pourtant, je me disais, penaud : "Vous avez le temps de m'envoyer des messages (et à d'autres) jour après jour, en travaillant votre toile autour de quelque chose qui n'est pas réel".

"Nous n'avions plus de temps l'un pour l'autre." C'est ce qu'a dit un jour un de mes amis, au cours d'une conversation plus sérieuse. "La maison, le travail...le voisin !" Il a ri nerveusement. 

Il est amusant (pas amusant) de constater à quel point il est facile de perdre la notion du temps lorsque les obligations s'accumulent et que la routine vous aspire. 

Je me souviens qu'il y a quelques mois, les disputes étaient incessantes, le divorce était un mot, et nous passions notre temps à grimper sur l'échafaudage du toit, à colmater les fuites au milieu de la nuit. L'acharnement à résoudre problème après problème, alors que tout le monde autour de nous semblait toucher à la perfection.

Alors que nous montions pour la troisième fois à 3 heures du matin, la pluie frappant le métal et le vent soufflant du nord…j'avais envie de pleurer. Mais je ne l'ai pas fait...au lieu de cela, j'ai fait une pause, j'ai rassemblé mes pensées et j'ai commencé à réciter à voix haute, au-dessus de tout le bruit, pour qu'il puisse m'entendre :

"Juste une fois, j'aimerais un Noël normal. Du lait de poule, un putain de sapin de Noël, un peu de dinde. Mais non. Je dois ramper dans cette putain de boîte de conserve!" 

Il m'a regardé, la lampe frontale m'aveuglant, et il s'est mis à rire !

"John McClane obligé de ramper dans un autre conduit d'aération." Il m'a répondu.

"Die Hard baby!" Nous avons tous les deux applaudi en chœur. 

"Mettons ce spectacle sur la route…" Ajoute-t-il en collant la feuille de plastique autour de la cheminée.

Souvent, il n'y a pas le bon moment ou assez de temps pour quoi que ce soit. On ne peut pas planifier le plaisir ou l'avenir longtemps à l'avance. 

On peut s'emparer d'une idée et sacrifier le temps d'une série d'obligations pour se retrouver à mi-chemin dans un nouvel endroit et s'embrasser plus longuement, ressentir plus profondément et jouer plus fort.  

"Je suis désolé...j'ai besoin de temps…" A envoyé un texto un ami. 

"J'attendrai." J'ai répondu.